Permettez-moi d'encore vous parler de Lalibela,

cette vieille femme du Wollo, cette Dame, ma Reine d'Ethiopie, 

que les plus fidèles de mes lecteurs connaissent et respectent depuis longtemps.

Mais peut-être ne connaissez-vous mon blog "Là où mes mines me mènent" que depuis peu ?  En parcourant les articles que Lalibela a inspirés - voyez la "galerie de dessins" en colonne de droite  -, vous pourrez découvrir son pays, le Wollo, au nord de l'Ethiopie, percevoir tout ce que ce visage représente à mes yeux, ressentir à quel point il me bouleverse !

Avec la mendiante rwandaise, cette autre vieille dame à la peau burinée par le soleil qui ne peut non plus laisser celui qui la regarde indifférent, Lalibela est sans aucun doute un de mes dessins les plus appréciés et dont je suis le plus fier.

Ces deux portraits, j'avais choisi de les montrer une première fois en juin 2009 à l'occasion d'un "Week-End Wallonie Bienvenue" en compagnie d'oeuvres de nombreux artistes theutois ; puis à nouveau en mars 2011 lors de ma première exposition personnelle de 75 dessins au Centre Culturel de ma ville.  Tous deux impressionnèrent beaucoup les visiteurs et dès le vernissage puis le premier jour d'ouverture au public, ils avaient trouvé acquéreurs.  Parfois, je les regrette : qu'ils soient en de bonnes mains me rassure ...

                                              la mendiante africaine                  la veille Rom                     Lalibela

L'on m'a écrit que personne ne pouvait ignorer Lalibela et rester indifférent en face d'elle : elle fut de toute évidence l'objet d'une unanimité émotionnelle hors du commun, tant son visage dégage une intense expression que chacun ressent et interprète selon sa sensibilité.  D'elle et de son portrait, j'ai entendu ou lu ces mots :

Elle est "le devenu" apaisé, serein ; elle n'a plus rien à apprendre tant elle a tout appris en perçant les secrets du monde ; j'en reste bouche bée ; elle est extraordinaire de beauté ; je suis émerveillée par la beauté de cette femme ; c'est un visage très émouvant car une grande sérénité s'en dégage ; est-elle belle ou laide ?  Elle a beaucoup de charme malgré son vieil âge, on dirait une sage ; un si beau portrait, elle mériterait que vous l'appeliez la Reine Lalibela ; tous ces détails, ces ombres et cette expression, c'est hallucinant de précision ; on ne peut rester insensible face à tout le poids de son regard, à toute l'acuité du message qu'elle semble nous adresser ; aimable et fabuleuse Lalibela, dont les yeux nous disent avec une tendresse l'incroyable injustice de notre monde ; portrait saisissant d'une femme au regard empreint d'une grande dignité ; dommage que cette magnifique Lalibela ne sache à quel point vous avez su l'aimer et nous la faire aimer : peut-être son fardeau aurait-il été moins lourd si elle avait connu sa destinée sous votre crayon ; moi aussi, je sens une reine sous ses beaux traits, et un détachement qui est sans doute l'apanage de la misère ; nous serons moins laids lorsque nous pourrons voir la beauté des autres ...

Je n’oublierai jamais cette visiteuse que Lalibela interpella intensément.  Elle resta un long moment bouche bée en la regardant ; apercevant son désarroi, je m'approchai d'elle.  Sans voix durant de longues secondes, des larmes dans les yeux, elle me dit ensuite toute son émotion face à ce portrait, elle m'expliqua que les souffrances que cette vieille Ethiopienne portait en elle se lisaient à travers ce regard fier et résigné : ce fardeau la rendait belle et superbe à ses yeux, des douleurs personnelles profondes resurgissaient en elle-même ... 

La beauté de cette belle Dame sur laquelle je m’étais penché durant près de deux cents heures décuplait en un instant.  Ce visage m'avait ému, profondément, lorsque je l'avais découvert en photo :  je n'imaginais pas que le dessin né sous mes mines pourrait ensuite tant bouleverser quelqu'un.

Je n'ignorais pas - et vous en avais parlé en septembre dernier - qu'au début de l'été 2011, une amie internaute, Tifet, s'était lancée dans une merveilleuse mais périlleuse aventure : représenter en trois dimensions et en argile le visage de Lalibela (non sans m'avoir auparavant contacté pour que je lui envoie à cette fin, outre une bonne reproduction de mon dessin, la photo qui l'avait inspiré).

Je ne doutais guère de la réussite finale de ce projet artistique et me réjouissais de découvrir sa sculpture achevée !  J'admirais déjà l'énorme talent de l'artiste : elle avait par exemple déjà redonné vie à sa grand-maman Laure en la modelant de main de maître, d'après ses souvenirs et par simple observation d'une petite photo d'identité.   Tout récemment, c'est Gandhi qu'elle a magistralement ressuscité. Voyagez dans son blog : outre sa passion pour l'Egypte, vous y découvrirez d'autres superbes oeuvres !

Voici donc la sculpture de Lalibela, avant la cuisson, que Tifet dévoila le 5 septembre sur son blog !  Lorsque je la découvris pour la première fois, dès le premier coup d'oeil, je ne pus que m'exclamer Quelle ressemblance !  Quelle réussite ! et j'écrivais à Tifet qu' au-delà de cette admirable similitude, je retrouvais avec grande émotion ce regard qui me bouleversa tant lorsque je le dessinai, ce regard empli de tristesse et de résignation, ce regard usé mais fier et serein d'une vieille dame que la vie n'a sans doute jamais épargnée ! 

Lalibela en terre non cuite et avant séchage	Lalibela en terre non cuite et après séchage

Permettez-moi de tenter de résumer ci-après, tel que je l'ai perçu, tout le processus de réflexion et de création - rempli de doutes et d'incertitudes - qui a amené Tifet, après la cuisson, à patiner sa sculpture afin d'obtenir un résultat final merveilleusement réussi. 

Lalibela non cuite dévoilée le 5 septembre, ai-je écrit : ce jour-là, Tifet explique qu' après cuisson à 1300 degrés chez sa professeur de sculpture, Lalibela devrait prendre une couleur "pain brûlé" ; j'ai un peu la trouille, ajoute-t-elle.

Le 2 janvier, comme tous les lecteurs de son blog, je découvre enfin la sculpture cuite que ces mots accompagnent : Elle aurait dû être couleur "pain brûlé" ... elle est plus claire avec quelques touches plus foncées, je crois que je vais la laisser comme cela, à l'état "brut".  Une patine ?  Peut-être pas ...  Donnez-moi votre sentiment !

Lalibela après cuisson

En toute sincérité, j'avoue alors à Tifet, à demi-mots, ma déception "... tout en la trouvant très belle, pour les raisons évoquées la première fois que je la vis sur votre blog, je dois avouer que je la préférais dans sa couleur d'origine non cuite, non sèche même ...  Je pense que Lalilela me plairait mieux avec une patine foncée !  ... "  Son avis est similaire au mien car elle me répond : Je vous comprends Jean-Claude car quand je l'ai récupérée chez le potier, j'ai été un peu déçue par son teint !  Je la voyais plus foncée, plus proche de la photo d'origine.  Alors maintenant, j'ai un vrai problème, comment la patiner ? il faut que je fasse des essais, à suivre donc, j'ai encore du boulot ! 

Le 24 janvier, un nouvel article paraît.  Aujourd'hui, elle est terminée ...  Après avoir longtemps hésité, cherché, fait des essais, j'ai suivi mes envies, ça a été laborieux, long, j'étais pleine de contradictions et voilà, j'ai osé : j'assume pleinement ce qu'elle est devenue.

Pour les vêtements, j'ai fait une patine au lait chaud avec des pigments de blanc, pour le visage j'ai d'abord commencé par faire les rides (tous les creux) en cire marron foncée au pinceau, puis j'ai passé ensuite une cire plus claire sur tout le visage en plusieurs couches en essuyant au chiffon, puis de la cire noire au chiffon par endroits comme les sourcils ou le menton, le creux des yeux, tout en laissant ces petits points blancs lumineux dans les yeux pour "illuminer son regard".

J'éprouve une profonde admiration, un coup de foudre instantané pour cette "nouvelle" Lalibela, que je découvre aussi belle qu'en réalité (du moins, que la profonde réalité que ce visage exprime, puisque de cette Dame nous ne connaissons que la photo).

Au-delà de mon émerveillement, au-delà des émotions que cette sculpture de veille Ethiopienne parvient à susciter en chacun et que je ressens probablement plus que tout autre, j'épinglerai tout particulièrement le talent et la volonté de Tifet ...  Quelque peu déçue, comme moi, par la couleur de la peau "après cuisson", n'a-t-elle a décidé de se lancer dans ce périlleux travail de patine, au risque de tout gâcher !  Il fallait oser prendre ce risque et elle a relevé ce défi, avec talent : magistralement !  A en juger par les commentaires déposés sur son blog, personne, d'ailleurs, n'a pu rester indifférent et ignorer Lalibela : jugez-en par  vous-même en lisant ces quelques extraits.

Elle est époustouflante !!!  Epoustouflante de vérité, de sentiments à fleur de peau ... Elle est devenue une oeuvre d'art à part entière ; quelle maîtrise !  Quelle réussite totale. 

Tant de réalisme, devant tant de véracité.  L'humaine condition dans toute sa splendeur ...  Dans les premières secondes, j'ai vraiment cru qu'elle allait me parler ...  Et puis, lorsque nos regards se sont attardés l'un sur l'autre, elle m'avait parlé !  Ses rides, sa moue, l'inclinaison de sa tête, ses yeux qui longuement investirent les miens, tant elle me parla : je vis combien elle était belle, combien son âme était belle ... 

Cela est de mon goût !!!  Ses yeux plein d'humanité sont là et il est certain que l'on a envie de lui poser des tas de questions sur ce qu'elle a vu et entendu durant sa longue vie !!!

Elle est belle et nous dit à chacun beaucoup de choses sur son histoire !!!

Bravo Tifet, Lalibela est encore plus expressive comme cela, la patine du temps lui ira si bien ...

La patine lui va bien et d'ici quelques temps, lorsqu'elle sera moins "neuve", je pense que ce sera encore plus vrai !

C'est bien d'avoir osé, il faut toujours suivre son instinct.  Ce teint basané lui va bien et la rend très réaliste, le visage est buriné par la vie ...

C'est magnifique !!! Pour mes yeux elle est vivante.  BRAVO !

Je suis conquise par ce visage buriné et j'admire le talent de l'artiste.  C'est très beau.

Génial, tu as super bien travaillé la colorisation de ton oeuvre.  C'est magnifique.  Quelle perfection !

    Vous aurez compris, cher lecteur, que Lalibela, cette vieille Dame du Wollo,

pour Tifet comme pour moi, est dorénavant "notre" Reine d'Ethiopie !

MISE A JOUR DU 8 FEVRIER 2013

      Je vous emmène vers mon nouveau blog,

un bébé-blog qui, par vos visites, grandira !

Un clic sur l'image ou le lien ci-dessous vous y guidera !

http://mesmines.hautetfort.com